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  • Julien Geffray

[Série du Perma-Commercial 4/4] : Stratégie personnelle & Code du Perma-Commercial

Ce post clôture la « Série du Perma-Commercial ». Vous en profiterez d’autant plus que vous aurez lu les précédents, en particulier le premier. Vous y aurez découvert l’origine et les objectifs de cette série d’articles, qui résume une douzaine d’années d’expériences amères comme heureuses.


Je ne peux le nier, ce métier de commercial m’a apporté d’augustes joies, des revenus confortables et une certaine forme de reconnaissance sociale – mais il m’a aussi soumis à un vieillissement prématuré dû au stress, à une remise en question humaine sévère et à trop de négations de mes valeurs. Pour pouvoir exercer cette profession de façon à la fois vertueuse et performante, j’ai usé de lectures, thérapies et de deux années de coupure. Heureusement, nombre d’entre vous n’ont pas besoin d’en passer par là pour être tout à fait intègres et entièrement satisfaites de leur métier. Dans mon cas, cela a eu l’effet de formaliser ce qui semble à d’autres absolument naturel, et de le partager ici.


Ce dernier post propose un ensemble de principes rassemblés au sein d’un Code du Perma-Commercial, qui me semblent suffisants pour devenir un commercial à la fois vertueux et exceptionnellement performant.


Ces principes ne peuvent s’appliquer qu’au sein d’un cadre éthique, où vous devez vous positionner à chacune de vos paroles et actions. Cette éthique peut, pourquoi pas, être celle de la permaculture : respecter l’environnement, respecter les personnes humaines, partager équitablement les ressources. Hors d’une telle éthique, le code ne devient qu’un outil sans notice et, comme tous les outils, potentiellement dangereux. Désire-t-on qu’un vendeur d’armes soit durablement performant ?


Le Code du Perma-Commercial peut s’appliquer en groupe, et je rêve de découvrir un jour une équipe qui utilise, en collectif, des préceptes de ce type. Je crois que cela lui conférerait une puissance et un rayonnement extraordinaires.


Il a cependant été créé pour l’individu qui souhaite survivre moralement au sein de tout environnement, même le plus cynique et agressif. Il est au métier de commercial ce que le "développement personne" est à la recherche du bonheur pour chacun d’entre nous. Il fonctionnera évidemment d’autant mieux que l’environnement est favorable à son application, tout comme il est plus facile d’être heureux dans un pays en paix que dans une zone de guerre. Le levier principal du bonheur – qui comprend la justesse de nos actions, moyens d’existence compris - est donc celui sur lequel on a vraiment prise : la détermination ("addithana" !) de suivre un chemin qui nous semble juste.


Le code est une boussole, pas un ensemble de lois. Si, comme moi, vous avez été formés à un commerce sous testostérone, il est probable que vous transgressiez ces propositions plus d’une fois – mais ainsi équipé vous serez en mesure d’évaluer les conséquences profondes de vos actes, d’interpréter correctement les retours de bâtons éventuels que le monde ne manquera pas de vous adresser. Cela m’est arrivé maintes fois. Sachez que votre environnement sera d’autant plus impitoyable avec vous en cas d’incartade, que vous aurez pris l’engagement public de pratiquer un commerce vertueux - il est donc tout à fait raisonnable de rester furtif à ce sujet dans un premier temps.


Qu’à cela ne tienne, si vous vous engagez intérieurement à n’y être pris qu’une seule fois ! Petit à petit, vous prendrez de l’assurance dans cette nouvelle façon de commercer, les résultats ne pouvant manquer de graver dans le marbre – et aux yeux de tous- la pertinence de votre attitude.


Le code


 


Ce premier principe est inspiré du principe de permaculture "tout jardine", ainsi que du concept de « football total ». Il met l’accent sur le fait que la moindre action au sein de l’entreprise, et a fortiori la moindre virgule dans un e-mail, le moindre souffle expiré, le moindre mot prononcé par un commercial a une influence sur les résultats de vente. L’image que vos clients auront de vous se nourrit du moindre de vos comportements – loin de vous crisper, il s’agit d’en prendre conscience pour en faire un atout, et soigner l’intégralité de vos interfaces avec les autres, en interne comme chez le client. Plusieurs principes reprendront cette idée dans le détail et je ne m’y attarde pas ici.


Cependant, ce principe énonce également qu’au-delà de votre personne de commercial, tout dans l’entreprise œuvre aux ventes. Vos compétences et votre temps sont malheureusement limités. Vos collègues du back-office ou de la production sont bourrés de compétences que vous n’avez pas et qui pourraient bénéficier à vos stratégies de vente voire, directement, à vos clients. Il est donc primordial que vous embarquiez avec vous, dans l’effort de vente, l’intégralité de l’entreprise. Cela peut être physique (vous emmenez vos collègues avec vous en rendez-vous commercial) comme moral : partagez les succès comme les échecs, et prenez en charge le « roman d’entreprise ». Suscitez une prise de conscience collective du service que vous rendez aux autres humains que sont vos clients. Créez ce « nous » qui vous donnera de la force en tant que commercial, et qui vous libérera de nombre d’obstacles internes contre lesquels vous luttez aujourd’hui.


Cela peut vous sembler une charge de travail supplémentaire, et c’est le cas. Cela implique de vous intéresser davantage à vos collègues, leurs valeurs personnelles et leurs objectifs professionnels. Cela exigera de vous une exposition inconfortable (entre autres, dévoiler votre stratégie commerciale et la soumettre au jugement), un réel effort de pédagogie et un engagement de résultats (car toutes les bonnes énergies que vous rassemblerez ne seront renouvelables qu’avec des effets tangibles). Cependant, les rendements de cet investissement seront exponentiels. J’ai déjà raconté sur ce blog qu’avec ce type d’implication, mon équipe avait multiplié les interfaces entreprise-client et non seulement les opportunités de vente de produits existants, mais également la création de nouveaux produits !


Comme moi, vous serez surpris de l’enthousiasme que suscite, chez la plus grande partie de vos collègues, le sentiment de contribuer directement à la réussite d’une vente. Mais après tout, n’est-ce pas pour ce sentiment de valorisation que vous-mêmes exercez ce métier ?





Le commercial, c’est celui qui "parle bien" dans l’imaginaire collectif. Parfois, c’est celui qui parle trop, ou à tort et à travers. Il est vital d’appliquer ce principe qu’on retrouve dans toutes les spiritualités. Considérez que vos mots, ceux que vous écrivez comme ceux que vous articulez, sont sacrés.


En qualité d’abord. Ne faites subir à aucun de vos mots l’affront d’être un mensonge. Chaque mot qui émane de vous, élément du langage, est le fruit de millions d’années d’évolution. C’est une perle que vous offrez au monde. Aucun ne doit être délibérément violent, grossier, médisant, tendancieux, etc…


En quantité, certainement. J’ai personnellement horreur du vide dans une conversation et je n’ai (hélas pour vous) aucun talent pour la synthèse. Pourtant, l’expérience montre que combler un vide, « parler pour parler », appauvrit considérablement la conversation, l’énergie de l’échange et l’impression finale de ce moment partagé. Laissez un blanc s’installer dans ce rendez-vous client, laissez-le durer, et voyez qui le rompra en premier. Plus le blanc durera, plus il en sortira quelque chose de profond et d’inattendu. Votre but en tant que commercial n’est pas d’orienter la conversation vers ce qui vous intéresse (votre produit, vos services), mais vers ce qui intéresse le client (ses douleurs que vous pourrez résoudre, ses priorités, ses rêves, son budget…) et qui finalement a beaucoup plus de valeur pour construire votre stratégie.


Taisez-vous donc ! Vous avez deux oreilles et une seule bouche, essayez donc d’écouter deux fois que vous ne parlez. Idéalement, vous devez rester un mystère et, à l’inverse, tout savoir de votre interlocuteur. Cette balance informationnelle en votre faveur sera votre meilleur atout. Ne parlez de vous que si vous pensez que cela peut rendre service à la personne qui vous fait face. Si c’est pour « créer de la proximité », abstenez-vous en – c’est pourtant une technique archi-pratiquée par les commerciaux ! Mais votre client ne souhaite pas devenir votre ami, il souhaite que vous résolviez ses problèmes. Une fois que vous l’aurez fait, peut-être qu’une relation pourra se créer, mais il est ridicule de cultiver une « relation » avant un résultat. Le défaut de certains commerciaux est qu’ils ont un profond besoin de séduire, à tel point qu’ils sont prêts à être d’accord sur tout, à s’inventer les mêmes centres d’intérêt que leurs clients, à être si affables qu’ils en deviennent mielleux… Le principe "Pas de Compromission" permettra également de s’affranchir de ce jeu de rôles qui ne rend service à personne.


Bien entendu, cette révérence pour les mots doit s’appliquer à ceux de vos interlocuteurs. En s’adressant à vous, quelque chose d’important émane de leur personne pour votre bénéfice. Ecoutez-les attentivement pour une compréhension profonde. Pesez bien ces paroles, transformez-les en entendement et efforcez-vous d’y répondre en y ajoutant de la valeur. Ne répétez leurs mots que si vous avez un doute quant à leur compréhension. Et surtout, abstenez-vous de couper la parole à qui que ce soit.


Oups, vos mots ont dépassé – ou trahi - votre pensée : vous avez menti ou médit. Cela arrive. Il est trop tard pour ces mots, ils ont créé leur effet néfaste et vous allez en accepter et payer le prix. Prenez le temps de comprendre pourquoi et comment cela ne doit plus se produire. Puis, pesez de nouveaux mots et demandez sincèrement pardon, publiquement si besoin et sans attendre.


Vous avez été agressé par des mots d’autrui. Cette personne vous a fait un "cadeau" que vous êtes libre de refuser. Laissez ces mots s’évanouir sans qu’ils ne laissent de traces. Surtout ne les attrapez pas pour les renvoyer avec encore plus de force qu’ils ne vous ont atteint. A titre personnel, le classique livre de développement personnel Les 4 accords toltèques s’est avéré précieux dans ma façon de répondre de façon non violente à ce genre d’agressions. Il n’est jamais trop tard pour cesser de jalonner son chemin de colères et de disputes !





Un de mes professeurs de permaculture propose un principe intéressant pour quiconque effectue un stage chez lui :" sois ici et partout comme si tu y étais pour toujours". Vous l’avez déjà lu de nombreuses fois sous la forme suivante : « merci de laisser cet endroit aussi propre que vous aimeriez le trouver en entrant ».


Le Perma-Commercial jardine son marché. Il cultive des affaires sur un sol bien vivant, riche et protégé des ravageurs. Bien sûr, il consulte la météo (les actualités de son marché) pour se prémunir des catastrophes extérieures, mais la plupart du temps il ne compte que sur ses propres efforts pour obtenir une production satisfaisante. Or, créer un écosystème stable et nourricier demande des efforts sur de longues années !


Comme un locataire ne cherchera pas à améliorer un logement où il ne se projette pas, le commercial ne pourra devenir Perma-Commercial que s’il intègre dans son comportement l’hypothèse qu’il restera toute sa vie à ce poste, face à ces clients.


Comprenez bien : il ne s’agit pas de le décider ni de faire semblant. Il s’agit d’être persuadé que l’univers entier se portera mieux si vous cultivez ce poste et ce marché de façon permaculturelle, avec un objectif de résilience. Il est probable, à notre époque où la durée d’un poste est de plus en plus courte, que votre successeur récoltera de nombreux fruits tombés des arbres que vous aurez plantés sans les voir grandir. Tant mieux pour cette personne, soyez-en heureux pour elle !


De même, vous devez tant aux autres. Faites la liste de toutes les personnes à qui vous devez ce poste – même ceux contre lesquels vous pestez intérieurement, ressentez-en de la gratitude, et vous pourrez préparer sans réserve un beau terrain pour les suivants.





Et si vous deveniez un anarchiste convaincu ? Notre monde du travail de 2021, si libéral, doit permettre de s’affranchir des rapports de domination, et de vivre selon des règles d’empathie et de respect. Votre client n’est pas votre maître, c’est un humain comme vous. Votre chef n’est pas Dieu, il n’est pas infaillible et son pouvoir sur vous, quel que soit la façon dont il l’exerce, n’est pas un phénomène naturel. Personne n’est légitime pour décider à votre place de ce qui est bon pour vous.


Fort de ces convictions, identifiez toutes les situations de conflit impliquant un rapport de domination stérile, destructif et qui n’est pas animé par l’intention sincère de faire le bien du plus grand nombre. Profitez-en pour réfléchir à l’engagement de votre propre ego dans votre activité professionnelle : est-il raisonnable ? Quelles sont les qualités humaines que votre poste actuel va vous aider à développer ?


En s’examinant sincèrement, on se découvre parfois des ambitions mal placées. Mon propre parcours de transformation a démarré le jour où j’ai réalisé, effaré, la place que mon ego avait prise dans mon parcours et ce que j’étais devenu pour mes collègues. Je vous souhaite de ne jamais devoir aller jusque là pour mettre en place votre mutation de Perma-Commercial !


Ce principe donne énormément de force, en particulier lors de face-à-face tendus, que ce soit le lundi matin en "réunion de l’équipe commerciale" - qui peut parfois tourner à la séance d’humiliation collective, ou en rendez-vous avec un client qui a décidé de passer ses nerfs sur vous. Vous pouvez refuser, dans la plus grande dignité, les "cadeaux" qu’on vous offre, que ce soit une attaque directe ou une remarque pernicieuse. Tout n’attend pas de réponse. L’e-mail ou la parole agressive discréditeront leur auteur beaucoup plus que leur destinataire, si celui-ci garde de la distance avec la critique formulée. Je ne préconise pas de se fermer à la critique, mais bien de la prendre pour ce qu’elle est : l’expression d’un ressenti qui doit être entendu, compris et traité comme un problème à résoudre – si possible en équipe.




Ma première expérience de commercial donnait une place considérable à la concurrence. Je consacrais un temps fou à l’intelligence économique. Dans des situations parfois dignes d’un romain d’espionnage, il m’est arrivé de me procurer des informations confidentielles qui, j’en avais le sentiment, allaient me donner un avantage considérable dans les affaires.


En réalité, j’y ai perdu d’autant plus de temps que, par ces manigances, je cherchais surtout à défendre les points faibles de mon produit, du temps qui aurait été précieux à valoriser ses points forts. D’autre part, je prenais le risque insensé d’introduire de la négativité, par la médisance, dans mon discours – contrevenant ainsi au principe de la parole sacrée. Enfin, prendre ses décisions en fonctions d’informations capturées – et donc statiques – est forcément vecteur d’erreur dans le temps long. Car nos concurrents évoluent, comme tout.


Depuis, j’ai fait du chemin et j’ai pu constater que les meilleurs commerciaux n’ont jamais une parole contre la concurrence : au pire, ils font comme si elle n’existait pas, se donnant une posture de confiance sans en avoir l’air.


Mieux, les commerciaux les plus respectables que j’ai rencontrés affichent une entente cordiale au milieu de leurs concurrents. Ils dansent au milieu des requins, sans la moindre once d’inquiétude, et savent utiliser leur force par le gré de l’échange d’informations, de services parfois, ou même d’alliances. Je m’y suis essayé. J’ai organisé un repas de Noël pour mes concurrents : 25 commerciaux d’une quinzaine d’organisations rivales, rassemblés autour du plaisir de la table et de se connaître en tant qu’humains, après des années passées à se croiser dans les couloirs des clients communs. Cela m’a permis d’en découvrir certains dans leur humanité la plus crue, de nouer des relations durables et, cerise sur le gâteau, de me proposer comme interlocuteur crédible pour l’ensemble d’entre eux – moi qui étais nouveau sur ce marché.


Alors n’ayez pas de concurrents. Ayez des "confrères", qui font leur métier avec le même cœur que vous, qui vendent des produits ayant leur propre qualité. N’hésitez pas à recommander l’un ou l’autre à votre propre client quand vous sentez que le marché ne vous sera pas si profitable, par exemple si votre produit ne correspond pas vraiment au besoin. Vous remonterez dans l’estime à la fois du client et du confrère, et ce seront des graines qui germeront forcément un jour. De plus, n’oubliez pas que le marché du travail est fluctuant. Pourquoi se fâcher avec un potentiel futur collègue ou employeur ? Si l’intérêt des autres peut servir le vôtre, ce n’est que mieux !


Ce principe n’est pas qu’un conseil d’attitude. C’est aussi une direction dans laquelle aller : je vous parle de faire en sorte de n’avoir réellement plus de concurrents, non parce que vous les avez éliminé, mais parce que, progressivement, vous pouvez décider de vous installer dans une niche que personne n’a visitée avant vous.


Le Perma-Commercial doit réfléchir, au nom de la résilience, à la diversité de ses propositions. Quelles sont les difficultés que personne n’arrive à résoudre pour votre client ? Que pouvez-vous y faire ? C’est ici que l’implication de tous vos collègues (tout commerce) sera précieuse, car vous-même n’aurez pas la réponse. Ce principe vient tardivement car, une fois que vous avez appliqué avec succès les premiers, vous avez déjà pris une place différente dans le paysage des commerciaux, et on ne s’adresse plus à vous comme à un simple vendeur, mais à un faiseur de solutions. De même, votre façon de travailler est nouvelle, elle a en soi une valeur. Pourquoi ne pas la décliner en service pour votre client ? Comment pourrait-il s’inspirer de votre performance vertueuse ? Proposez-lui d’y réfléchir ensemble !





J’ai longtemps cru que devenir un bon négociateur était la quintessence du métier de commercial, et que ma performance serait mesurée à la faiblesse des réductions de prix que je concèderais pour emporter un marché. C’était, bien sûr, l’époque où j’avais des "concurrents".


Or si vous devez négocier, alors c’est que le client n’est pas tout entier acquis à votre solution. En fait, vous ne l’avez pas convaincu du tout, et c’est en dépit d’avoir une réponse évidente à son besoin qu’il va choisir la solution la moins risquée financièrement.


Bien sûr, les départements « Achat » de vos clients n’ont généralement pas un "Perma-Acheteur" à leur tête, et ils ont donc les mêmes indicateurs que vous - ils sont par exemple rémunérés au variable sur la quantité de remises qu’ils vont obtenir sur des prix catalogue.


Pas de négociation ! Le prix, c’est le prix. Si le département Achat a apparemment tellement de pouvoir chez votre client, alors c’est que vous n’avez pas trouvé de sponsor assez haut placé chez ce client, et définissez une stratégie pour y parvenir.


Il se peut que le budget de votre client ne lui permette pas d’acheter vos services. Est-ce à vous de vous plier à cette contrainte ? C’est à vous de le décider – si vos prix catalogue sont trop élevés pour votre marché, à vous de le revoir. Mais la pratique courante qui consiste à afficher des prix catalogue élevés dans le simple but d’automatiquement « offrir » une remise à deux chiffres me semble nier toute intelligence et toute éthique.


Personne ne négocie à la pompe à essence : devenez le pompiste de votre client : qu’il paie sans arrière-pensée contre un service inestimable, et qu’il s’y presse en cas de pénurie.


Le besoin de négocier est un signal faible intéressant. Je pense qu’y avoir recours est fortement corrélé avec la non-résilience de notre entreprise – idée sur laquelle j’attends vos commentaires car je manque de recul pour la creuser.




Encore un principe en « pas » ! Ce code du Perma-Commercial est donc bien négatif, me direz-vous. Vous m’en excuserez. Je cherchais à la fois des idées courtes et percutantes, et qui expriment une idée globale de simplification du métier. Car la plupart de ces principes vous invitent à vous débarrasser de comportements qui vous encombrent et surchargent l’humain qui se cache derrière votre carte de visite !


Ce principe est très fort, mais il vient vers la fin car j’espère que vous le respectez déjà. Il s’agit simplement de ne pas se déguiser au travail, et de refuser tout comportement qui s’imposerait de par une certaine culture de votre milieu d’affaires. Je pense en particulier à la bise « obligatoire » (disparition annoncée en 2021), l’humour douteux, l’alcool au travail (en particulier lors des repas d’affaires ou des séminaires…)… Le travail est trop souvent une cour de collège avec ses dominants et ses suiveurs. Tout comme vous n’avez ni dieu ni roi, vous n’êtes pas obligé de devenir quelqu’un d’autre. Cela ne fera que pénaliser votre performance potentielle réelle, celle de l’humain en vous qui demande à s’épanouir.


Vous pouvez aller loin. Vous avez le sentiment de devoir porter tel costume ou tel tailleur au travail. Cela vous convient-il ? Qui l’a décidé, est-ce légitime ? Comment le remettre en cause de façon douce ? Un de mes amis, un commercial très performant, porte une superbe montre, des costumes très chers, et m’a un jour assuré que je devais en faire autant pour en imposer à mes clients – que c’était d’une certaine façon une marque de respect envers eux. J’en fus très intrigué. Je me suis mis à acheter ces costumes et ces chemises brodées à mon nom : l’ego aidant, je me suis ainsi grimé pendant des années! Il m’a fallu des siècles pour comprendre que ce déguisement lui convenait à lui, quelles qu’en soient ses raisons. Quand je m’en suis libéré pour accorder ma tenue –pratique et passe-partout- à mon comportement en clientèle – austère et dépourvue d’esbroufe -, mon personnage devenait beaucoup plus abordable pour mes clients, car proche d’une vérité qu’ils pouvaient enfin ressentir.


Et vous, à quelles compromissions pourriez-vous décider de mettre fin ?





Ce principe est sûrement le plus difficile à intégrer. Il sera pourtant le garant de votre liberté créative la plus ultime !


Par pas de bonus, je souhaite alerter sur un mécanisme simple et humain : si vous attachez une quelconque importance à une gratification dépendant de votre performance (prime, bonus, salaire variable), alors vos décisions en seront prisonnières. Je ne crois pas qu’on puisse avoir le nez sur le tableau de performance et prendre les décisions justes sur le long terme.


Dès lors, il faut abandonner son bonus. Je ne dis pas : le refuser, mais considérer qu’il n’existe pas, qu’il aura exactement l’importance que son nom indique : quelque chose de tout à fait superflu. Si vous dépendez de votre salaire variable pour assurer vos moyens d’existence, alors vous n’êtes pas tout à fait libre d’arrière-pensées au moment de prendre un arbitrage entre le profit pour vous, et celui pour le plus grand nombre. Et comme le dit un principe de permaculture : on ne travaille pas le ventre vide. Il vous faut donc être capable de subvenir à vos besoins avec un salaire fixe.


D’aucuns diront : oui, mais. Si je n’atteins pas mes objectifs, je serai viré : ce n’est donc pas non plus durable. C’est possible. A chacun sa réalité. Réalisez que ces objectifs ne sont malheureusement pas les vôtres, mais ceux qu’un chef a choisis pour vous. C’est à lui d’assumer de vous avoir recruté puis assigné ces objectifs – et ce sera lui que vous devrez convaincre un jour ou l’autre du bien-fondé de votre nouvelle démarche, si cela a des impacts sur votre « performance » au sens de ses indicateurs.


Profitez-en pour dresser une grille parallèle, celle de vos objectifs à vous - et chiffrez-les également, que ce soit en temps pour la famille, en nombre de sourires reçus par jour, en jours sans prise d’anxiolytiques…


Il est tentant de voir les risques. Mais pensez positivement : votre nouvelle condition mentale vous amènera peut-être à exprimer plus de créativité, à explorer de nouveaux terrains de jeu… et qui sait obtenir de superbes résultats, une augmentation ? Il est essentiel de mesurer dès le début quels sont les gains et les pertes potentielles à amorcer le changement que j’ai décrit dans cet article.


En effet, en plus de ne pas s’attacher à une rémunération conditionnelle, l’idéal est de ne pas davantage s’attacher à son poste. La vraie liberté professionnelle s’obtient quand on est prêt à perdre ce poste par intégrité à ses valeurs et ses convictions. Ne rien avoir à perdre permet l’assertion de soi, la prise de risque, la libération de la pression hiérarchique ou sociale…


Peur de manquer d’argent, peur de perdre son travail… sont des ennemis du « bonheur en entreprise », tout comme la peur tout court est l’ennemi du bonheur tout court. Cela ne veut pas dire que, malgré une situation personnelle qui nous attache à un poste ou un niveau de rémunération, on ne peut pas appliquer tous les autres principes et être en chemin vers ce nouveau job de Perma-commercial. Au contraire, avoir conscience de ses propres attachements est le préalable nécessaire s’en libérer un jour. C’est ce que je souhaite à chacun d’entre nous !


Que va-t-il se passer ?


Vous possédez désormais un code de principes auquel vous pourrez vous référer chaque mois, semaine ou tous les jours, afin de déterminer dans quelle direction vous allez. Suis-je en marche vers un business éthique et durable ? Ou bien suis-je enfermé dans la même logique court-termiste qu’avant ? Inventez vos propres indicateurs principe par principe, suivez-les dans un tableau, faites confiance à votre ressenti – votre méthode sera la bonne.


Profitez-en pour repérer les signaux faibles de la transformation en cours : les expressions de gratitude reçues par vos clients ou collègues, les opportunités nouvelles, votre propre ressenti au travail, les affaires remportées que vous auriez perdu l’an dernier… vous êtes en route vers quelque chose de plus authentique que ce que vous avez vécu jusqu’à présent, et il est impensable que votre qualité de vie reste la même.


Pour autant, restez modeste, humble et discret. Le modèle court-termiste ne vous laissera pas faire facilement. La première année (ou même les premières années si vous pratiquez des ventes complexes), il vous faudra des trésors de pédagogie pour exposer vos vues en interne, justifier de vos choix stratégiques. Gardez toujours à l’esprit que ce ne sont pas les personnes qui s’opposent à vos choix, mais bien le système dans lequel ces personnes se sentent obligées de s’inscrire, et dont vous avez commencé à vous libérer. Plus tard, les succès viendront vous aider et bientôt on ne vous ennuiera plus que pour des questions de forme.


Rapidement, vous allez trouver des appuis : le service de contrôle de gestion, qui appréciera votre transparence. Les équipes de terrain, qui se sentiront respectées et concernées par les succès auxquels vous ne manquerez pas de les associer. Les ressources humaines, que vous ne manquerez pas d’associer à vos succès. Et bientôt, les clients, qui expliqueront à vos responsables hiérarchiques à quel point vous êtes un élément clé de la bonne entente entre vos entreprises.


Votre marché est votre jardin. Plus vous le soignerez, plus vous créerez l’abondance pour vous, pour les autres et pour le monde.


Post-scriptum


Cette série du Perma-Commercial est terminée. Si vous l’avez suivie en entier, vous avez compris qu’elle ne peut pas s’appliquer à tous les commerciaux du monde. En effet, la permaculture s’inscrit dans une éthique écologique profonde. Or, de nombreux secteurs et entreprises auront malheureusement du mal à s’inscrire dans cette éthique. Que pensez-vous des marques qui ferment les yeux sur le travail des enfants, de l’industrie de l’armement, de celle de l’alcool ? C’est un débat sans fin et sans vérité. Pour ma part, le sens de ma vie dépend de la façon dont j’aligne ce que je fais avec pourquoi je le fais et comment je le fais. Cette série du Perma-Commercial avait à cœur de traiter le Comment, et rien d’autre.


Je vous souhaite du courage, et les joies qui le récompenseront.



Remerciements


Pour les contributions décisives qu’ils ont apporté à mon évolution, je souhaite ardemment remercier les personnes suivantes :

- Pr. Newton Braga Rosa, Professeur à l’Université de Porto Alegre, pour ses cours de business bienveillant dès 2003

- Nelson Pirès, CEO de GENS S.A. pour avoir gravé en moi la certitude que le commerce est soluble dans l’humanisme

- Pascal Froux, CEO de Fermat SAS pour m’avoir permis de faire mes premiers pas de commercial en 2008

- Gérard Lary et Charles Mauclair, pour avoir créé l’environnement m’ayant permis d’appliquer ce code pendant cinq ans.

- David Géraud, le commercial qui se rapproche le plus, de tous ceux que j’ai connus, du modèle du Perma-Commercial – et qui a inspiré de nombreuses réflexions de cette série.

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